Port-au-Prince, le 29 juillet 2025 – En pleine détérioration du climat sécuritaire et social, le Gouvernement haïtien, par l’intermédiaire du Fonds d’assistance économique et sociale (FAES), a annoncé de nouvelles mesures d’aide en faveur des personnes déplacées internes (PDI). Cette déclaration, faite dans le cadre des « Mardis de la Nation », survient alors que la crise humanitaire prend une ampleur alarmante dans plusieurs départements du pays.
À première vue, les chiffres avancés sont impressionnants : plus d’un million de repas chauds distribués, 41 restaurants communautaires actifs dans l’Ouest, plus de 21 000 kits alimentaires et sanitaires remis aux sinistrés. Le directeur général du FAES, Serge Gabriel Colin, assure que les actions s’intensifient, et que des efforts d'insertion sociale sont en cours, notamment l’emploi de déplacés dans certaines structures de restauration.
Une politique humanitaire plus curative que préventive
Mais au-delà des chiffres, l’action gouvernementale révèle un manque flagrant d’anticipation. Face à une situation de violence qui s’est installée progressivement depuis des mois, voire des années, les autorités ont, une fois de plus, attendu que la crise explose pour réagir. Les mesures déployées apparaissent alors comme des pansements d’urgence sur des blessures profondes, plutôt qu’une réponse stratégique et préventive.
Peu de mesures structurelles ont été prises pour éviter ces déplacements massifs : aucun plan de sécurité renforcé dans les zones à risques, absence de politique de logement social, insuffisance des filets sociaux. Résultat : une intervention en aval d’un désastre que l’on aurait pu contenir.
Une réponse partielle et inégalement répartie
Alors que le FAES étend ses activités au département du Centre, beaucoup d’autres régions, tout aussi affectées, demeurent en attente d’un soutien réel. Martissant, la Plaine du Cul-de-Sac, certaines zones de l’Artibonite ou encore de la Grand’Anse, vivent dans un abandon quasi total, selon plusieurs organisations de la société civile.
Cette concentration géographique soulève des interrogations : priorisation politique ou choix logistiques ? Dans tous les cas, elle révèle l'absence d’un plan national cohérent de gestion des crises humanitaires.
Des mécanismes de contrôle encore flous
Le gouvernement affirme avoir mis en place des systèmes de contrôle avec la police communautaire pour garantir la transparence de la distribution. Mais les expériences passées et l’opacité du système administratif laissent sceptiques bon nombre de citoyens. Aucune publication de budget détaillé ni de rapport indépendant n’est venue appuyer ces annonces.
Un réveil tardif aux conséquences durables
Ce nouvel élan du FAES, bien qu’utile à court terme, n’efface pas les lacunes profondes d’une gouvernance réactive. Les personnes déplacées internes, qui vivent dans des conditions précaires et souvent indignes, ont besoin de plus que des repas quotidiens : elles ont besoin de sécurité, d’un toit, de services de santé, d’un avenir.
La gestion de cette crise rappelle, une fois de plus, que le pays ne peut plus se contenter de réponses post-catastrophes. Une vision de prévention, d’investissement social et de planification à long terme devient impérative, si l’État souhaite véritablement protéger ses citoyens et rompre le cycle de l’urgence permanente.